Vous êtes désormais familier.ère avec la roue de la rentabilité, cet outil développé par la Fédération Horeca Bruxelles pour aider les entrepreneur.se.s à cibler les éventuels problèmes liés au bon développement de leur établissement. Après en avoir détaillé le premier axe dans le Be Horeca du mois de mars 2023, nous nous attaquons cette fois à la question des primes.
Par Romane Henkinbrant
La cerise sur le gâteau
Votre concept ou projet d’évolution est bien ficelé, votre plan financier bien ancré (si vous avez un doute, retrouvez notre article à ce propos dans la 5ème édition de notre magazine Be Horeca). Si vous avez de quoi payer le gâteau, il est maintenant intéressant de se pencher vers les nombreuses aides disponibles pour les indépendant.e.s et PME dans le cadre du développement de leurs projets. Mais attention à ne pas les surestimer ! Comme l’explique David Debin, spécialiste social de la Fédération Horeca Bruxelles, « Les aides, primes et autres subsides ne sont pas un automatisme. Les conditions à respecter sont strictes. Compter dessus et les voir vous passer sous le nez est la chronique d’une mort annoncée. Au contraire, ce n’est que du bonus lorsqu’elles arrivent comme une cerise sur le gâteau de vos avoirs ». En bref, les meilleures primes ne remplaceront jamais un modèle d’affaires performant et une stratégie réfléchie. Néanmoins, dans les plus gros projets, ces aides font partie intégrante du montage financier : les banques tiennent compte de l’obtention probable d’une prime et glissent souvent dans le dossier de crédit une attestation basée sur l’expérience d’un professionnel en la matière. Et puis, si elles sont disponibles, pourquoi s’en priver ?
Des primes, oui mais pour qui ?
Les indépendants en personne physique et les sociétés en personne morale peuvent bénéficier de primes. De nombreux facteurs déterminent ensuite les conditions et influencent les taux :
– La taille de l’entreprise
– La date de création de l’entreprise Les codes d’activité de l’entreprise : les codes NACE (au niveau TVA) sont la référence pour l’administration afin de déterminer les plafonds et pourcentages des aides. Il est donc essentiel qu’ils soient bien définis et à jour.
– Le siège d’exploitation de l’entreprise : c’est le siège d’exploitation (où l’entreprise exerce au moins une de ses activités) qui détermine la région de référence pour la prime et non le siège social (par exemple, on peut avoir son siège social à Namur et demander une prime pour un de ses établissements situé à Bruxelles).
– Le respect des règles administratives : vous ne pouvez pas bénéficier d’aides si vous n’êtes pas en règle au niveau administratif ou si vous avez des arriérés de paiement auprès d’une administration. Attention à la durée du projet et au maintien de l’activité : si vous obtenez une prime, votre entreprise doit rester trois à cinq ans dans la région. Si l’activité ou le matériel est revendu endéans les cinq ans, vous serez susceptible de devoir rembourser tout ou une partie de ce que vous avez reçu. L’administration se réserve le droit de contrôler les bénéficiaires.
En veux-tu, en voilà !
Plusieurs primes sont disponibles, que vous soyez une start-up ou une entreprise déjà bien établie.
- Primes à l’investissement :
A. Général : de 5% à 30% pour des achats ou des travaux (bâtiment, matériel, véhicule utilitaire…), même dans des locaux dont vous n’êtes pas propriétaire.- Si l’établissement a moins de 4 ans à l’adresse d’exploitation : il peut demander une prime pour tous les travaux et achats qu’il va faire (des travaux de gros œuvre à la petite cuillère, en passant par le mobilier).
– Si l’établissement a plus de 4 ans à l’adresse d’exploitation : seulement remplacer ou rafraîchir ne suffit pas. Il faut développer l’activité, soit en la diversifiant (par ex. vous ne faisiez pas de livraison à domicile et vous décidez d’en faire), soit en augmentant la surface exploitée (par ex. vous aviez seulement un rez-de-chaussée et vous aménagez l’étage pour faire une grande salle).B. Mise aux normes : pour les établissements qui ont plus de deux ans à l’adresse d’exploitation, une prime de 40% existe pour la mise aux normes en termes d’hygiène, de sécurité et de qualité. Il est donc intéressant d’envisager un maximum d’achats neufs deux ans après l’installation.C. Autres spécifiques : pour l’Horeca par exemple, la sécurisation d’un établissement (ex. installation de caméras, alarme,…), des aménagements PMR (ex. des rampes, des toilettes spécifiques, un ascenseur, etc.) ou des aménagements d’intégration urbaine (lutte contre un trouble de voisinage, toitures vertes, pollution…), imposés par une décision judiciaire/administrative ou un permis, peuvent faire l’objet d’une prime de 40% avec des plafonds variables (NB : les escaliers d’évacuation n’entrent pas en compte car il s’agit d’une obligation de sécurité incendie). - Primes à la consultance (informatique, juridique, …) et pour un site internet/e-commerce : Taux de 40% à 60%, plafonds de 10.000€ ou 5.000€ par an.
- Primes à la formation spécifique au développement de l’entreprise (langue, management,…). Taux de 40% à 60%, plafonds de 10.000€ ou 15.000€ par an.
- Primes à l’énergie :A. Compensatoire : elle cible les surcoûts des factures de gaz/électricité de 2022 par rapport à 2021. Son taux d’intervention est de 30%, jusqu’à 100.000€. Les dossiers doivent être rentrés avant le 15 novembre 2023.
B. Investissement : investissements économiseurs d’énergie généraux (ex. des frigos fermés, le renouvellement des installations d’éclairage au moyen d’ampoules LED, la gestion temporelle ou présentielle des luminaires, une ventilation avec récupération de chaleur, des portes à fermeture automatique) et/ou directement liés à l’activité principale du bénéficiaire et qui remplacent une machine ou un équipement de performance énergétique significativement moindre (ex. un four ou un frigo professionnel). Taux d’intervention de 50%, jusqu’à 50.000€. Ne fonctionne pas si on a déjà eu un subside pour le matériel en question.
C. Consultance : en vue d’économiser de l’énergie et de réaliser la transition énergétique des entreprises. Cette aide est plafonnée à hauteur de 15.000€. Son taux d’intervention est de 70%.Attention, pour ces deux dernières primes, les dossiers doivent être rentrés avant le 11 juillet 2023. A noter qu’une rétroactivité est prévue : les dépenses encourues depuis le 1er septembre 2022 pourront être prises en compte.D’autres primes, comme la prime à l’exportation, les primes au recrutement (liées à des profils spécifiques) ou les primes à l’innovation technologique ne s’appliquent pas particulièrement au secteur de l’Horeca. Retrouvez les différentes primes existantes sur le site de https://economie-emploi.brussels/.
Le mot clé : anticiper*
Les subsides ne constituent pas un (pré)financement : il s’agit presque toujours du remboursement d’une dépense qui a été réalisée (après cependant avoir obtenu une autorisation de démarrer). Seules les initiatives futures peuvent donc prétendre à des primes. Il est essentiel de suivre la procédure administrative à la lettre.
- Introduire une demande préalable (expliquer le projet et annoncer un montant non contraignant) : la dépense doit être réalisée dans les conditions données.
- L’administration vous envoie un accusé de réception autorisant le démarrage du projet.
- Pour la quasi-totalité des primes à Bruxelles, vous avez six mois pour réaliser les dépenses et recevoir les factures. Conservez bien tous les justificatifs des dépenses et devis sur la bonne adresse de facturation (pas de dépenses privées) ;
- Introduire un dossier final avec les factures, les extraits de comptabilité, des descriptions de ce qui a été réalisé et des photos avant/après.
- L’administration analyse le dossier et donne sa décision finale.
Bref, un mot clé : anticiper ! La bonne approche est de vous demander régulièrement quels sont les grands postes de dépenses que vous allez réaliser dans l’année à venir.
* Il est important de noter que les systèmes en Flandre, en Wallonie et à Bruxelles sont complètement différents.
Rêve ou réalité ?
Les primes peuvent avoir un gros impact dans la concrétisation de nombreux projets. Pourtant, trop peu d’entreprises y font appel, souvent découragées face à la lourdeur administrative que cela représente. Les institutions publiques font de gros efforts pour rendre l’information accessible et améliorer les procédures, mais encore faut-il les comprendre et veiller à les respecter. Des professionnels se font l’intermédiaire entre l’administration et les patrons de PME pour aider ces derniers à trouver le chemin dans le dédale des dizaines de primes publiques – régionales, communautaires, fédérales, sectorielles, européennes…
Les chasseurs de primes
Hormis deux ou trois « cow-boys », la plupart des « chasseurs de primes » sont des professionnels reconnus du secteur de l’accompagnement d’entreprises, avec une large expérience. Seule une poignée d’acteur.rice.s l’assurent de A à Z et en ont fait leur activité principale. Nous avons rencontré Guillaume Dewispelaere de Chasseur de Primes pour le questionner sur les avantages de faire appel à un expert en la matière.
Chasseur de PrimesIngénieurs de formation, Gisèle Roosels et Guillaume Dewispelaere se sont lancés dans les primes en 2009, lorsqu’ils en ont décroché une à l’achat de leurs bureaux. Depuis, ils ont satisfait plus de 3000 professionnels dans tous les secteurs à Bruxelles, dont environ 35% dans celui de l’Horeca. Ils s’occupent de tous les types de primes, axent leur pratique sur une analyse et une optimisation globale des opportunités, sur une organisation rigoureuse et se rémunèrent au résultat. https://chasseurdeprimes.be/ ; T. +32 (0)2 343 57 44 ; info@chasseurdeprimes.be |
“Avant de compléter un dossier, un bon chasseur de primes va optimiser la recherche selon le profil de votre entreprise.”
Quelle est la plus-value d’un chasseur de primes ?
En vous lançant dans la recherche de primes, vous êtes rapidement confrontés à la rigueur des administrations. Il est donc essentiel de suivre les consignes à la lettre pour ne pas se retrouver dans la pile des dossiers incomplets. En faisant appel à un chasseur de primes expérimenté, vous vous assurez d’être dans la première pile. D’une part, sur base d’un grand nombre de dossiers traités, nous avons connaissance des nuances d’application des règles qui ne sont parfois pas précisées dans la loi ou qui évoluent – il y a une notion d’interprétation : il faut savoir lire entre les lignes. D’autre part, il ne s’agit pas seulement d’administratif, nous avons l’habitude d’appréhender le contexte et les projets d’une entreprise pour établir au mieux chaque demande. Enfin, notre approche structurée et systématique est un des facteurs du succès.
Avant de compléter un dossier, un bon chasseur de primes va optimiser la recherche selon le profil de votre entreprise en s’intéressant à l’entièreté des dépenses [cf. la roue de la rentabilité]. Une entreprise vit, se développe et va régulièrement devoir investir, racheter du mobilier, faire de la publicité, mettre à jour son site web, etc. Il faut donc avoir une vision large de vos projets futurs, estimer le potentiel de primes, leur meilleure structuration et établir un plan d’actions concret. En phasant un investissement, on peut optimiser les primes car certains types de travaux peuvent faire l’objet de demandes groupées ou séparées, au final mieux subsidiées. Il est parfois aussi intéressant de laisser tomber une prime pour en décrocher une plus grosse quelques mois plus tard.
Avez-vous des relations privilégiées avec les administrations ?
Les administrations reconnaissent pleinement le rôle de mandataires comme les chasseurs de primes qui interviennent pour aider les entreprises. Ces dernières signent un mandat qui nous donnent la possibilité de gérer entièrement leurs dossiers en leur nom du début à la fin de la procédure. Les plateformes digitales des administrations ont prévu cette possibilité et les échanges sont dans la plupart des cas efficaces. L’intérêt de l’ensemble des acteurs est le même : que le système d’aides fonctionne et soutienne le plus possible les entreprises qui créent ou maintiennent de l’activité et de l’emploi à Bruxelles.
Combien coûte un chasseur de primes ?
Les chasseurs de primes travaillent souvent au pourcentage de la prime obtenue, uniquement en cas de succès (no cure, no pay). Il n’y a donc aucun risque financier à faire appel à nous.
L’expérience de Knees to Chin« Au début de Knees to Chin, j’avais fait un premier dossier de montage de subsides. C’était laborieux, ça m’a pris un temps énorme, une énergie monstre. J’ai donc commencé à travailler avec Chasseur de Primes. Maintenant, à chaque fois qu’on a un projet, qu’il s’agisse de l’ouverture d’un restaurant ou d’un investissement, je les contacte et je leur demande si des primes existent. Ils connaissent leur métier et sont en contact direct avec des experts dans le domaine. Ensuite, c’est toute la construction du dossier, le suivi. Même s’il y a un coût associé à ça, pour moi, il n’y a pas photo : c’est carré, organisé, ils sont hyper réactifs, suivent le dossier de près et le poussent si c’est parfois un peu long. Ils ne lancent pas des demandes pour rien : si le sujet ou l’investissement à faire ne rentre pas dans les clous, ils nous préviennent et nous font économiser de l’énergie. Avec Knees to Chin, on commence à sortir de Bruxelles, notamment Gand et Louvain-la-Neuve. Ils ne travaillent pas dans ces zones-là mais ils nous ont mis en contact avec d’autres collaborateurs. Ce sont de super conseillers. On travaille avec eux depuis 9 ans de manière ponctuelle. On a jamais changé d’interlocuteur depuis toutes ces années et on est hyper content. » Roxane Gernaert, fondatrice et CEO de Knees to Chin. |
Les banques
Certaines banques proposent parfois à leurs client.e.s de les accompagner dans la recherche de primes, tant pour soutenir les investissements généraux que pour la consultance. Leur expertise et leur lien direct avec les projets leur permettent de répondre au plus près aux besoins de chaque client.e, par exemple en introduisant plusieurs demandes différentes simultanément. Les aides aux investissements peuvent être assez importantes et ainsi donner un bon coup de pouce à l’activité. Nous avons rencontré Xavier Reul de BNP Paribas Fortis pour lui poser quelques questions à ce propos.
BNP Paribas FortisBNP Paribas Fortis commercialise sur le marché belge un éventail complet de services financiers auprès des particuliers, indépendants, titulaires de professions libérales, entreprises et organisations publiques. Dans le secteur des assurances, BNP Paribas Fortis opère en étroite collaboration, en tant qu’agent d’assurance lié, avec AG Insurance, leader du marché belge. Au niveau international, la banque propose des solutions sur mesure aux particuliers fortunés, aux grandes entreprises et aux institutions publiques et financières, en s’appuyant sur la compétence et le réseau international de BNP Paribas. https://www.bnpparibasfortis.be/ ; T. +32 (0)2 433 43 32 |
Quelle est la plus-value d’une banque dans la recherche de primes ?
Je dirais qu’il y en a deux. La première concerne le service public. Si la banque intervient, cela signifie qu’un investissement va être réalisé car nous allons le financer. Deuxièmement, notre expertise nous permet d’avoir un taux d’obtention d’aides aux investissements très élevé. Chez BNP Paribas Fortis, nous soutenons les entreprises qui forment le moteur de l’économie belge. Et l’Horeca en fait certainement partie. Même en cas de crise, nous sommes présents. Par exemple, nous avons énormément aidé nos clientes et clients dans le cadre de la pandémie de coronavirus mais aussi dans le contexte de la crise énergétique.
Avez-vous des relations privilégiées avec les administrations ?
Cela fait des années que nous développons des relations étroites et constructives. Le service public reconnaît et respecte notre expertise. Nous nous rencontrons régulièrement et pour les dossiers les plus complexes, nous organisons des rencontres entre le service public et le demandeur pour pouvoir optimiser la demande et le montant des aides à recevoir.
Combien coûte la « chasse aux primes » avec l’aide d’une banque ?
Cela dépend des banques. Chez BNP Paribas Fortis, nos tarifs font partie des plus concurrentiels du marché. Ils comprennent les frais de dossier de 500€ HTVA (sauf pour les clientes et clients Advice Pro pour lesquels c’est gratuit) et une commission de 7% HTVA sur les aides perçues.
“Certaines banques proposent parfois à leurs client.e.s de les accompagner dans la recherche de primes.”
L’expérience d’OrNormes Kitchen « Pour le lancement de notre atelier de production (OrNormes Kitchen) en support de nos restaurants (Ricotta & Parmesan – Zotte Mouche – Unik Osteria), nous nous sommes renseignés auprès de différents chasseurs de primes (avec lesquels nous avions travaillé pour nos restaurants) pour voir ce qui était possible en termes de subsides. Il y avait pas mal de possibilités moyennant divers tarifs (flat fee, pourcentage sur les montants potentiels ou réellement récupérés). Pour le dossier de l’atelier, notre banquier nous a proposé ce service. Via Mr. Xavier Reul de BNP Paribas Fortis, tout a été pris en main depuis le début (administratif, préparation des dossiers, suivi et analyse des factures, optimisation des primes, conseil, état des lieux, …). En résumé, une réelle facilité car il a suffi de tout envoyer par mail et Mr. Reul s’est occupé de tout. Au total, nous avons reçu une petite centaine de milliers d’euros de subsides divers » |
hub.brussels
L’agence bruxelloise, spécialisée dans l’accompagnement d’entreprises, accompagne la création et/ou le développement / l’export d’entreprises. Ils travaillent en étroite collaboration avec Bruxelles Economie et Emploi et ont en interne un expert en subsides qui peut informer les entreprises sur les primes existantes et les aiguiller vers les organismes compétents. Ils informent, conseillent et aident les entrepreneur.se.s à la rédaction du business plan qui va de pair avec l’introduction d’un dossier de demande de prime.
Contacts utiles
|
Si vous manquez de financement pour votre projet, les primes ne sont certainement pas la solution. Dans ce cas, il peut être intéressant de vous diriger vers d’autres supports financiers comme le prêt Proxy, le prêt fournisseur, la dette subordonnée, etc. Il est néanmoins important de noter que, contrairement aux primes, les solutions de (re-)financement ne sont pas de l’argent « gratuit » mais des prêts à rembourser. La thématique sera abordée en compagnie d’expert.e.s lors de l’Apéro Club du 26 juin 2023 et sera retranscrite dans le prochain numéro du Be Horeca.