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Be-european : Réduire le gaspillage alimentaire : un défi européen

 

HOTREC est l’association européenne représentant l’industrie de l’Horeca en Europe. Forte de ses 45 années d’existence au service de l’Horeca, HOTREC est la voix de 2 millions de restaurateurs et hôteliers au niveau européen. Sa Directrice Générale depuis 2020, Marie Audren, répond à nos questions sur cette thématique. 

Par Françoise Bouzin 

 

Be-Horeca : Quel bilan tirez-vous de la conférence organisée par la commission « Réduisons le gaspillage alimentaire »? 

Marie Audren, Hotrec
Fred Guerdin ©

Marie Audren : Plus de 58 millions de tonnes de déchets alimentaires (131 kg/habitant) sont produits chaque année dans l’Union Européenne (UE). Les chiffres Eurostat de 2023 montrent que les ménages et consommateur.rice.s européen.ne.s génèrent plus de 54% du gaspillage alimentaire dans l’UE, lorsque les restaurants et hôtels représentent en moyenne moins de 9 % de ce total, loin derrière l’industrie agro-alimentaire. Un autre élément éclairant réside dans le fait que 70 % des aliments que nous jetons sont encore comestibles ! La conférence organisée par la commission européenne « Réduisons le gaspillage alimentaire » en juin 2024 a mis en lumière l’importance cruciale de réduire les pertes alimentaires pour protéger l’environnement et soutenir la sécurité alimentaire. Des expert.e.s ont souligné les progrès réalisés notamment par l’Horeca, mais aussi la nécessité d’intensifier les efforts pour sensibiliser les consommateur.rice.s. 

Au niveau européen, à ce stade, nous nous concentrons sur la proposition de loi de la commission européenne qui consiste à introduire des objectifs obligatoires de réduction du gaspillage alimentaire d’ici à 2030 au niveau des états membres. Si l’intention est louable comme le démontre notre action sur le sujet et celle des membres d’HOTREC y compris Horeca Bruxelles, nous sommes convaincus que des mesures ‘soft’ et des recommandations sont bien plus efficaces qu’une intervention réglementaire. La lutte contre le gaspillage nécessite des solutions adaptées aux petites entreprises que nous représentons.  

B.H. : Quelles mesures concrètes préconisez-vous pour la réduction du gaspillage alimentaire ? Citez les 3 prioritaires  

M.A. :

  1. Renforcer les campagnes de sensibilisation au niveau européen pour encourager les comportements responsables des consommateur.rice.s y compris lorsqu’ils ou elles sont en vacances. Nous savons désormais que le ‘gap’ existant entre la volonté d’action et l’action réelle est d’autant plus grand lorsque les consommateur.rice.s n’évoluent pas dans leur environnement quotidien.  
  2. Réduire le gaspillage à chaque étape, de la production à la consommation est une nécessité. L’expérience montre que la véritable réduction du gaspillage alimentaire se produit lors de la phase de planification et d’achat. Ici, la question de la gestion et l’anticipation des réservations et des commandes est décisive. Les ‘no shows’ ont des conséquences catastrophiques sur le service d’un restaurant et devrait être un sujet pris à bras le corps par les politiques locales. Promouvoir le compostage et les techniques de recyclage pour transformer les déchets en ressources utiles est aussi important. 
  3. Encourager et investir à tous les niveaux dans la formation du personnel de l’Horeca aux techniques de valorisation des produits alimentaires, au sourcing local et à la réduction du gaspillage.  

Les restaurants et hôtels représentent en moyenne moins de 9 % du total du gaspillage alimentaire dans l’UE. 

B.H. : Parlez-moi de l’action du chef australien Sam Bray ? En quoi peut-elle générer une solution ? 

M.A. : Nous avons accueilli pendant deux jours le chef australien Sam Bray qui a fait un tour d’Europe des pratiques durables. Il a pu rencontrer des acteur.rice.s clés de la gastronomie durable à Bruxelles et en Belgique y compris le Chef Joel Rammelsberg de chez Savage ainsi que les fondateurs Adeline Barras et le Chef Elliott Van de Velde du restaurant Entropy. Il a été époustouflé par l’équipe de Recyclo qui relève des défis au quotidien pour créer un compost de haute qualité à partir des surplus alimentaires collectés auprès de plus de 60 restaurants à Bruxelles. En Tasmanie, Sam s’évertue à faire changer les mentalités en cuisinant des espèces envahissantes, comme les wallabies et les oursins pour créer des plats gastronomiques. Cette démarche montre comment la créativité culinaire peut transformer des ingrédients parfois mal aimés en mets délicieux, tout en participant à la protection essentielle de la faune et la flore endémiques de Tasmanie. Sa venue et nos échanges démontrent encore une fois comment les rencontres font générer des discussions et des idées très enrichissantes.  

B.H. : Quelles sont les actions futures ?  

M.A. : Chez HOTREC, nous continuons à défendre l’Horeca et œuvrons limiter les charges règlementaires, administratives et financières qui pèsent sur eux . Nous tenons à valoriser les initiatives locales de restaurateur.rice.s engagé.e.s dans une démarche durable. Nous souhaitons aussi informer, mettre en relation et faire bénéficier ces acteur.rice.s des projets européens existants sur la question. Notamment en leur faisant bénéficier du vaste potentiel des technologies intelligentes pour mieux anticiper la demande ou fournir des informations précises sur la durée de conservation des aliments.