À l’heure où les communes bruxelloises repensent l’équilibre entre commerce, qualité de vie et dynamisme économique, nous avons décidé de lancer une série d’articles qui proposent une cartographie Horeca de celles-ci. Place à Etterbeek et à son bourgmestre Vincent De Wolf pour nous expliquer la réalité et les différentes mesures d’accompagnement du secteur.
L’évolution récente du tissu Horeca, la gestion des terrasses, l’arrivée de cuisines du monde, les aides économiques, la pression immobilière, les enjeux de durabilité… La commune a multiplié les outils pour encadrer et encourager un secteur en pleine mutation. « Etterbeek compte environ 250 établissements Horeca (restaurants, cafés, snacks et take-away compris). Il y a eu des départs et des arrivées. Durant le covid, nous avons aidé le secteur à hauteur d’un peu plus d’1 million d’euros, » explique le bourgmestre. Ces dernières années, Etterbeek a vu arriver une diversité « mondiale » rarement observée auparavant : restaurants éthiopiens, brésiliens, cuisines métissées… Une richesse qui s’explique en partie par la proximité du quartier européen, mais aussi par la volonté de la commune de favoriser une dynamique plurielle.
Gérer les zones à forte densité

Appel à candidature à la Chasse
À l’inverse, d’autres quartiers restent sous-développés. La Chasse, par exemple, souffre d’un déficit d’Horeca qualitatif. Le bourgmestre se rappelle « qu’enfant, il y a connu de nombreux restaurants, dont la grande brasserie Edgard et qu’il existe un véritable potentiel. » La commune encourage d’ailleurs l’expansion du pôle commercial jusqu’à Saint-Antoine, afin de rééquilibrer l’activité dans l’est du territoire.
Une politique proactive qui se traduit par des primes, du coaching et de l’accompagnement administratif. Etterbeek a créé Innov’ett – une maison des entrepreneurs – qui propose une série d’outils destinés à soutenir l’installation de nouveaux établissements et à accompagner les entrepreneurs locaux. Coaching, aide à la construction du business plan, séminaires « J’ose » pour les femmes entrepreneuses, systèmes de pop-ups mis à disposition autour de Jourdan… Innov’ett est devenu un point d’appui essentiel pour les porteurs de projets Horeca.
Une prime “premier établissement” et une agence immobilière commerciale
Parmi les autres incitants, on pointe la prime « premier établissement » oscillant entre 500 et 1 500 euros, (donc 500 d’office et 1000 € de majoration pour les projets démontrant une réduction de leur impact climatique). Une prime embellissement existe également pour soutenir la rénovation des façades et le renouveau commercial. Consciente que les loyers élevés d’Etterbeek peuvent freiner l’arrivée de nouveaux restaurants, la commune a créé une agence immobilière commerciale offrant diverses solutions comme des aides financières pouvant atteindre 27 000 euros à planifier sur 3 ans, un accompagnement administratif et des primes libres pour les bailleurs (jusqu’à 10 000 euros.) Des commerces comme « Tout un Fromage », « Pralins », etc. ont déjà bénéficié du dispositif. Et, pour lutter contre les cellules vides, la commune a mis en place une taxe sur les commerces inoccupés pour inciter les propriétaires à remettre leurs biens sur le marché.
L’attestation de conformité
Autre outil inédit mis en place par la commune d’Etterbeek depuis octobre 2024 pour sécuriser l’ouverture des restaurants, l’attestation de conformité est un document destiné à accompagner les restaurateurs dans leurs démarches administratives et réglementaires. En quelques mois, 65 attestations ont été délivrées. D’autres sont en cours. La cellule Horeca de la commune assure la liaison avec le SIAMU, l’AFSCA, les services communaux, etc. et fournit une information claire aux candidats restaurateurs. Une manière de réduire les erreurs, les mauvaises surprises et d’accélérer les ouvertures.
Piétonnisations positives
La piétonnisation de la place Jourdan est perçue comme globalement positive pour le commerce Horeca, malgré les défis de gestion sonore et de flux. « En cas de débordement, la commune peut intervenir au cas par cas avec des arrêtés provisoires modifiant les heures d’ouverture d’un établissement présentant des troubles. Les mesures générales sont juridiquement limitées par la jurisprudence, ce qui oblige à travailler café par café, en collaboration étroite avec la police », explique le bourgmestre Vincent De Wolf.
Durabilité : des labels, des primes et des initiatives citoyennes
Etterbeek affiche une volonté claire de pousser l’Horeca vers des pratiques plus durables avec différentes primes et programmes. Comme par exemple le Label « commerce engagé pour la propreté » qui permet de récompenser les restaurants pour leur gestion stricte des déchets, encombrants et containers. Mais aussi une prime commerce durable mise en place pour soutenir les établissements engagés dans le zéro plastique, le compostage ou les circuits courts. Quant au programme Dropl’ett, il est destiné aux commerçants qui s’engagent à offrir gratuitement un verre d’eau ou faire remplir sa gourde et donner accès aux toilettes ; en échange, ils sont indemnisés et identifiés par un autocollant officiel.
Entre gentrification et cohésion sociale
En résumé, la commune d’Etterbeek doit à la fois concilier la montée en gamme du Quartier européen et l’accessibilité pour les habitants des zones plus populaires, notamment La Chasse et l’ouest d’Etterbeek. Le bourgmestre affirme vouloir éviter un basculement complet vers un modèle inaccessible, en gardant un équilibre entre cuisines mondialisées, offres familiales, et concepts de qualité. Pour Vincent De Wolf, l’objectif est clair : accompagner les commerces qualitatifs, diversifier les quartiers, maîtriser les débordements des terrasses, soutenir l’entrepreneuriat local, encourager les pratiques durables, préserver l’Horeca comme lieu de socialisation essentiel. «L’Horeca n’est pas simplement un secteur économique, mais bien un vecteur de lien, de mixité et d’identité communale, » conclut-il.